La rédaction web à l’heure de la course à l’IA

Je suis de la Génération X, nourrie à la littérature d’anticipation et aux films de science-fiction. Quand les travaux R&D en matière d’IA ont été relayés et que les avancées ont été communiquées, je n’ai pas pu m’empêcher de penser « ben nous y voilà », et ce quel que soit le domaine d’application. Pensée un peu courte, je vous l’accorde. Et surtout biaisée puisqu’elle s’est accompagnée de l’image des humains dans le film « Wall-e » : obèses, ne se servant plus de leur corps pour se mouvoir et connectés aux machines H24.

Quand les outils IA d’aide à la rédaction Web sont apparus, je ne me suis pas précipitée pour les tester. J’avais déjà un avis bien tranché sur la question. Toutefois, rien ne sert de nier leur existence et leur possible utilité. Et si nous nous penchions sur les avantages attendus de l’IA rédactionnelle. Des avantages dites-vous ?

En croisant le contenu de plusieurs articles Web, les auteurs indiquent que l’IA nous évite l’angoisse de la page blanche. Ainsi, avec un « simple mot », la machine créée un article de A à Z. Autre exemple, votre réflexion vous a conduit au-delà d’un « simple mot », mais pas plus loin que le titre principal et deux sous-titres en souffrance. Hop, donnez ces éléments à l’IA et elle produira du texte segmenté en différentes parties.
Fantastique me direz-vous. Mais… parce qu’il y a toujours un « mais », vous allez devoir relire et retravailler le texte. Parce que « la machine » IA présente plusieurs limites :

• Elle n’est pas performante en termes de syntaxe
• Elle ne fait pas émerger de fil conducteur pertinent
• Elle ne structure pas un texte en pensant au lecteur
• Elle n’affiche pas un « style » particulier d’écriture
• Elle n’adopte ni ton distinctif ni ne suscite d’émotion

Enfin, vous avez des chances aussi grandes que l’univers intersidéral d’avoir un article dont le contenu a déjà été publié et republié. Cela étant dit, bonne nouvelle : il paraît qu’avec l’IA rédactionnelle, on gagne du temps et qu’on est plus productif. Regardons cela de plus près.

Gagner du temps et être plus productif… Qu’est-ce que cela veut dire ? Dans mon logiciel de pensée, si je gagne du temps ce n’est pas tant pour être plus productive mais pour pouvoir produire de manière plus qualitative. Avec l’IA rédactionnelle, le temps gagné correspond donc au temps « non passé » à réfléchir à son sujet ou à la structuration de son texte. Quant à la productivité optimisée, il s’agit de pouvoir « publier plusieurs articles par jour ou par mois ».
Deux questions me viennent à l’esprit :

•  A-t-on mesuré le temps consacré à la relecture et au travail de réécriture du contenu produit par l’IA ? Est-il moins chronophage que le temps pris par le rédacteur pour réfléchir, seul, au contenu de son article ?
• Quant à la productivité… Avons-nous réellement besoin de produire du contenu en masse ? Oui, me direz-vous dans un souci de référencement. Ou plutôt de course au référencement. Pour quel résultat au final ? Pour continuer à noyer le Web sous des flots d’articles redondants, faits de reprises d’autres articles ?

Ce qui me gêne dans ces premiers outils IA rédactionnels, ce n’est pas tant leur existence et leur futur développement qui pourrait s’avérer, au demeurant, plus intéressant, mais plus la façon dont nous les abordons. Avez-vous vraiment besoin, pour rédiger votre article, d’une IA ? Si on parle de trouver l’inspiration, de créer une trame, de définir des titres, ne disposons-nous pas déjà de notre propre outil d’intelligence créative ? Notre cerveau !

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Je vais vous raconter une anecdote. Il y a quelques jours, je devais terminer une étude stratégique pour un client. Je peinais un peu à « dynamiser mes neurones » et à établir une stratégie de contenu. C’était une forme d’angoisse de la page blanche. Ma mère me raconta l’interview, sur France Culture, de Camilla Läckberg, écrivaine suédoise. Interrogée sur son processus créatif, cette auteure de romans policiers a expliqué combien il pouvait lui être difficile de trouver l’inspiration pour ses livres. Pour faire naître la trame d’une histoire, elle se forçait à « travailler ». Se mettre à son bureau et se creuser les méninges. Conclusion : pas d’inspiration sans effort.

Alors oui, ce n’est pas toujours évident de trouver l’inspiration pour son article, cela peut prendre du temps et nous sembler frustrant. Mais d’une part il existe des méthodes pour définir des sujets d’articles et d’autre part, n’oubliez-pas le plaisir ressenti lors de « l’instant Eurêka » et après avoir mené, seul, une rédaction à son terme. Et même s’il s’agit d’un article un peu « bateau » avec un sujet « passe-partout », vous éprouverez plus de satisfaction à faire une veille pour rechercher des informations, les traiter et les recouper plutôt que de laisser l’IA le faire pour vous.

N’oublions pas que rédiger un article Web c’est aussi laisser aller sa plume, en parallèle des exigences de pratiques SEO. C’est parler à son lecteur et capter son attention, c’est adopter un ton particulier et chercher à présenter le sujet sous un angle différent.

Alors, amis rédacteur Web, recherchez le plaisir rédactionnel et non la facilité. Faites travailler vos méninges, amusez-vous, continuez à être le maître de vos écrits. Faites confiance à votre cerveau et à votre capacité créative. Et si un jour, l’IA rédactionnelle nous permet de brainstormer avec elle à voix haute, de développer un écran tactile 3D pour nous aider à poser nos idées et à en faire émerger de nouvelles (comme Tom Cruise dans Minority Report), alors oui, à ce moment-là, je ferai de l’IA une camarade de jeu pour la rédaction Web.